6 Conclusion

L’instauration du contrat-type de travail (CTT) de l’économie domestique et sa mise en oeuvre s’inscrivent dans un contexte tendu dans laquelle la politique d’immigration devient un enjeu politique et économique important. La tension est accentuée par la démocratie directe qui, via des initiatives populaires 43 ou des référendums 44, permet au peuple de se prononcer par rapport à une problématique ou encore de s’opposer à une décision prise par les autorités politiques.

La fixation d’un seuil de salaire minimum impératif dans le domaine du travail domestique sur le territoire suisse constitue une importante progression dans la protection des travailleurs domestiques. Elle permet de diminuer le risque de sous-enchère salariale auquel s’expose une immigration en grande partie issue de pays à bas salaires. Ce seuil constitue un critère absolu et opérationnel au niveau des contrôles à effectuer, en cas de différents entre l’employé-e et son employeur ou dans le cadre des projets de chèque emploi facilitant ainsi la transition des travailleurs domestiques vers l’économie formelle (OIT 2010).

Le fait que les normes déterminant les conditions de travail les plus élémentaires tels que le temps de travail, le temps de repos, le salaire, etc. ne sont pas réunies dans une seule base juridique et contraignante comme c’est le cas pour les conventions collectives de travail, rend une protection efficace des employé-e-s difficile. Il est donc à saluer que le gouvernement suisse se soit engagé à chercher des solutions qui renforcent le cadre légal facilitant aux travailleurs de connaître et de réclamer leurs droits.

L’analyse des données statistiques, de par la nature de ces dernières et même si elles sont de qualité et quantité suffisantes, ne peut pas être substituée aux contrôles au sein des entreprises. Par conséquent, l’utilisation des statistiques devrait se limiter à l’établissement des conditions de travail en usage comme, par exemple, pour déterminer le salaire en usage ou pour identifier les branches à risque subissant une pression salariale.

Si le fédéralisme suisse a permis au canton de Genève d’instaurer, déjà en 2005, un salaire minimal impératif et de faire profiter la Confédération de son expérience, le fédéralisme d’exécution se caractérise par une grande disparité au niveau des contrôles effectués par les cantons – observation, qui s’applique également à d’autres branches.

Malgré l’accès difficile aux ménages privés, le respect du salaire minimum impératif dépend de la qualité et de la quantité des contrôles effectués. Afin de pouvoir disposer d’une base de décision pertinente en ce qui concerne le monitoring des mesures d’accompagnement, il est indispensable que les infractions identifiées par les contrôles soient répertoriées selon la norme heurtée (type de CTT) et non pas selon la définition d’une branche regroupant plusieurs CTT.

L’entrée en vigueur du salaire minimal impératif sur l’ensemble du territoire suisse en 2011 par un contrat-type de travail et la décision du gouvernement de le renforcer et de prolonger sa validité jusqu’au 31 décembre 2016 forment le fondement d’une protection future efficace des travailleurs domestiques. Celle-ci dépendra autant de la capacité de pilotage du gouvernement fédéral que de la mise en oeuvre réalisée par les cantons.

References

OIT (2010). Accompagner La Transition Des Travailleurs Domestiques Vers l’économie Formelle, Le Système Des Chèques Services. Travail, Le Magazine de l’OIT 68,: p.9–10

  1. Le peuple suisse se prononcera sur deux initiatives populaires visant à limiter l’immigration en Suisse. Il s’agit d’une part, de l’initiative “contre l’immigration de masse” soumise à votation populaire le 9 février 2014 et, d’autre part, de l’initiative ECOPOP “Halte à la surpopulation – oui à la préservation durable des ressources naturelles” dont la date de la votation n’est pas encore fixée.↩︎

  2. La droite conservatrice et nationaliste a d’ores et déjà annoncé qu’elle allait combattre la nouvelle extension de la libre circulation des personnes avec la Croatie ayant adhéré à l’UE le 1er juillet 2013.↩︎